Des budgets qui répondent aux besoins des femmes au Maroc

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Les besoins des femmes et des filles sont plus reflétées dans la façon dont les gouvernements dépensent au Maroc et une nouvelle loi organique des finances adoptée en janvier 2014 par le Conseil de gouvernement a institutionnalisé l’égalité de genre tout au long du processus budgétaire.

"Avant, j'étais femme au foyer et tout mon temps était consacré au travail domestique. Un jour j'ai décidé de changer ma vie et j'ai rejoint l’école. Pendant deux ans, j'ai appris à lire et à écrire. J'ai appris aussi la calligraphie arabe et les arts plastiques. Aujourd'hui, je crée mes propres tableaux et avec les autres femmes dans ma classe, nous avons décidé de créer une coopérative pour mieux commercialiser nos produits », explique Fadma.

Fadma est une bénéficiaire d'un programme mis en œuvre par le département de l'Alphabétisation au Maroc – un des cinq départements pilotes qui ont adopté une approche axée sur les résultats et sensible au genre dans la planification et la budgétisation à l'aide des indicateurs de performance qui prennent en considération les besoins différenciés de genre.

La budgétisation sensible au genre vise à s'assurer que l'allocation des ressources publiques bénéficie de façon égale aux femmes et aux hommes. La Budgétisation Sensible au Genre (BSG) détermine comment les fonds publics sont dépensés et qui en bénéficie.

Le département de l'alphabétisation conduit actuellement une planification budgétaire de ses programmes par cibles, et qui sont en majorité des femmes constituant désormais 85% des bénéficiaires des programmes d'alphabétisation au Maroc.

Cette approche, qui a débuté en 2009, a permis au ministère de mieux s'adapter aux besoins de ses bénéficiaires. Ainsi, plusieurs programmes adaptés sont également élaborés en fonction des classes d'âge (15-24 ; 25 à 45 ans et 45 ans et plus), ainsi que de la situation d'emploi des bénéficiaires (salarié ou à la recherche d'emploi).

Un témoignage de l'engagement du Maroc en faveur de la BSG est l’élaboration du Rapport Budget Genre, qui évalue les politiques publiques et les dépenses selon le genre. Ce rapport est élaboré annuellement depuis 2006 et accompagne chaque année la loi des finances. Le rapport est le fruit d'un partenariat entre UNIFEM (l'une des organisations antérieures à ONU femmes) et le Ministère de l’Economie et des Finances, visant à intégrer une perspective genre dans le processus de réforme de la gestion du budget public. Le rapport genre constitue un renforcement des mécanismes de redevabilité pour l’atteinte des engagements du gouvernement en faveur de l’égalité de genre.

« Le Maroc est l'un des pays leader en matière de budgétisation sensible au genre » a déclaré Directrice régionale de l'ONU femmes pour les États arabes, Sameera al-Tuwaijiri, saluant les efforts du pays pour combler le fossé entre les sexes.

Les efforts continus ont permis à la BSG d’être progressivement ancrée dans le processus de réforme budgétaire du Maroc, avec cinq ministères pilotes introduisant la BSG dans leur processus de planification et de budgétisation et 27 ministères contribuant à la préparation du rapport genre. Depuis 2011, le rapport genre a également introduit une analyse selon les droits humains qui mesure les progrès accomplis par le Maroc à mettre en œuvre les obligations et les normes internationales des droits de l'Homme.

Autres résultats ont aussi étaient atteints. L’expérimentation de la gestion des finances publiques axée sur les résultats et sensible au genre depuis plus de 10 ans au Maroc a conduit à l'adoption, en janvier 2014 par le Conseil de gouvernement, d'une nouvelle loi organique des Finances qui institutionnalise juridiquement l'égalité des sexes tout au long du processus budgétaire. La nouvelle loi mentionne explicitement que l'égalité des sexes doit être prise en compte dans la définition des objectifs, des résultats et des indicateurs de performance des budgets sectoriels. La nouvelle loi organique institutionnalise aussi le rapport genre en tant que document officiel qui fait partie de la loi des finances annuelle.

Une autre avancée a été l’introduction de dispositions en faveur de l'égalité des sexes dans la Constitution de juillet 2011. Ainsi, l'article 19 consacre explicitement l'égalité entre les femmes et les hommes dans les droits civils, politiques, économiques, sociaux, culturels et environnementaux. La nouvelle Constitution introduit de même le principe de l'égalité des sexes de facto, par le biais de plusieurs articles qui mentionnent l'engagement du gouvernement à œuvrer pour la création des conditions permettant la réalisation de l'égalité entre les sexes et une représentation égale des femmes et des hommes dans tous les domaines.

Après l'adoption de la nouvelle Constitution du Maroc, en novembre 2012, ONU femmes a organisé la conférence internationale de haut niveau à Marrakech, qui a rassemblé près de 250 participants provenant de plus de 30 pays. Lors de cette conférence, le Coordonnateur résident des Nations Unies au Maroc, Bruno Pouezat, a souligné le succès de l'expérience marocaine en BSG et la plus grande impulsion dont elle va bénéficier au travers de la nouvelle Constitution. Il a également souligne le soutien de l'ONU aux efforts du pays dans l’intégration de l’égalité de genre dans les budgets, considérant ce mécanisme comme essentiel pour promouvoir les principes de transparence dans les politiques publiques.