ONU Femmes et Nokia : une alliance stratégique pour connecter les femmes pêcheurs
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« Avant cette formation, je n’avais jamais touché à un ordinateur. » — Fatima Makhnass, présidente de la coopérative “Moujat Belyounech”.
Fatima lors d’une session de formation sur le numérique organisée en mai 2025 à Tétouan. Crédits: ONU Femmes Maroc.
À Belyounech, un petit village côtier situé sur le détroit de Gibraltar, Fatima dirige une coopérative féminine engagée dans la filière halieutique, notamment dans le ramendage des filets et pêche. Chaque jour, elle pêche, répare des filets, prépare des palangres et participe à la transformation des produits de la mer. A l’instar de Fatima, plusieurs femmes originaires de M’diq, Martil ou Fnideq sont actives dans le secteur halieutique. Elles exercent divers métiers liés à la mer, allant de la pêche artisanale à l’aquaculture, en passant par la plongée sous-marine, la transformation et la valorisation des produits maritimes jusqu’à leur commercialisation.
Dans l’exercice de ces activités, les outils numériques occupent une place croissante, notamment pour la gestion, la communication ou la vente. Pourtant, l’accès au digital demeure limité pour une grande partie des femmes du secteur. Selon les données du Haut-Commissariat au Plan (2023), seules 30,5 % des femmes rurales au Maroc utilisent Internet, contre 52,3 % des hommes. L’écart est encore plus marqué dans le domaine professionnel : près de 60 % des hommes membres de coopératives ont bénéficié d’une formation numérique ou financière, contre seulement 23 % des femmes.
Un programme sur mesure pour combler la fracture numérique
Face à ces inégalités, le bureau d’ONU Femmes au Maroc et Nokia, ont organisé une formation visant le renforcement de l’inclusion numérique pour les femmes pêcheurs dans la région de Tanger-Tétouan-Al Hoceima. Cette initiative s’inscrit dans le cadre du partenariat stratégique entre Nokia et ONU Femmes visant à mettre la tech au service de l’autonomisation des femmes de la pêche .
L’initiative a été initiée en février 2025 à Fnideq, avec un atelier d’évaluation des besoins ciblant plus de 60 femmes pêcheurs, issues de huit coopératives locales. Les participantes y ont partagé leurs besoins, les obstacles rencontrés au quotidien et leurs attentes en matière de compétences numériques. Sur la base de ces échanges, un programme de formation sur mesure a été conçu par les volontaires de Nokia Maroc, en étroite collaboration avec ONU Femmes, puis mis en œuvre en juin 2025.
Un post-it illustrant les besoins en compétences numérique par les membres d’une coopérative. Crédits : ONU Femmes Maroc.
Ainsi, un atelier de formation de trois jours, structuré autour de quatre modules complémentaires, a été dispensé au profit de 65 femmes en juin 2025. Il a couvert l’usage des outils numériques en contexte professionnel, la cybersécurité, les soft skills, le marketing digital et la création de contenu. Un accent particulier a été mis sur la pratique, avec un accompagnement en petits groupes pour favoriser l’apprentissage actif.
Séance de travail en groupe au cours de la formation. Crédits : ONU Femmes Maroc
« Mon premier courriel, je l’ai envoyé pour inviter d’autres coopératives à la cérémonie de remise des prix, où la nôtre allait être reconnue comme la meilleure coopérative de la région Tanger-Tétouan-Al Hoceima. C’était un geste simple, mais il m’a permis de partager ma joie avec les autres. » — Ikram Yambour, présidente de la coopérative Basmat Al Bahriat, récemment primée par la Chambre de commerce et d’industrie de Tétouan.
Ikram prenant la parole lors d’une session de formation sur le numérique. Crédits : ONU Femmes Maroc.
Par ailleurs, des sessions de formation ont porté sur le renforcement des compétences interpersonnelles et collectives, à travers des ateliers autour de la confiance en soi, la communication efficace, la gestion des désaccords et la collaboration au sein des équipes. Ces modules ont permis aux participantes de mieux comprendre leur rôle dans le groupe, d’identifier leurs points forts et de fixer des objectifs personnels ou professionnels.
« Nous avons appris à mieux nous connaître et à mieux comprendre les autres. Ça rend notre travail plus fluide et plus efficace. » — Hayat Ghobra, monitrice de plongée et présidente de la coopérative Cordilia.
Hayat prend la parole pendant une session de formation. Crédits : ONU Femmes Maroc.
Un autre volet de la formation a porté sur le positionnement et la valorisation des produits de la mer. Les participantes ont été initiées aux fondamentaux du marketing : stratégie de marque, segmentation de l’offre, politique tarifaire et identification des canaux de distribution. La formation a également abordé la communication produit et la promotion visuelle, à travers des exercices pratiques axés sur la création de contenus digitaux, adaptés aux supports web et réseaux sociaux.
« La formation me permettra de mieux structurer notre communication et d’aider d’autres femmes à valoriser chaque produit à travers une histoire. » — Aya Alilou, responsable marketing, coopérative Basmat Albahriat.
Aya Alilou, lors d’une session de formation sur le marketing. Crédits : ONU Femmes Maroc.
Un outil pour aujourd’hui, un levier d’autonomisation pour demain
À l’issue du programme de formation, chaque coopérative bénéficiaire s’est vu remettre un ordinateur portable. Ce soutien vise à renforcer la mise en œuvre des compétences acquises, notamment pour assurer une meilleure gestion administrative, le suivi des activités, les échanges avec des partenaires ou la réponse à des appels d’offres.
Clôture de la formation et remise des certificats aux participantes. Crédits : ONU Femmes Maroc.
« À travers cette initiative, nous contribuons à concrétiser les objectifs de l’Agenda 2030 et du Pacte numérique mondial, en réduisant les inégalités d’accès aux technologies et en renforçant la participation active des femmes dans l’économie bleue » — Myriem Ouchen Noussairi, Représentante d’ONU Femmes au Maroc.
Ce programme s’inscrit dans le cadre du projet « Appui à l’inclusion économique des femmes œuvrant dans le secteur de la pêche », mis en œuvre par le Secrétariat d’État chargé de la Pêche Maritime et le bureau d’ONU Femmes au Maroc, avec l’appui du Gouvernement des Îles Baléares.
« Cette initiative répond non seulement à un besoin crucial de renforcement des capacités en outils numériques, mais elle incarne également une volonté claire du Secrétariat d’Etat chargé des Pêches maritimes de promouvoir l’autonomisation économique des femmes dans le secteur de la pêche. » — Ferdaous Mustapha, Délégué des Pêches Maritimes à M'diq.