Où je me tiens : « Et en tant qu’homme, je m’implique contre le harcèlement à travers desœuvres qui ne se contentent pas de l’esthétique, mais qui questionnent ce phénomène »

Soufiane Guerraoui est un jeune homme marocain engagé contre les violences faites aux femmes et le harcèlement dans les espaces publics. Avec ses collègues du collectif Zanka Bla Violence (Rue sans violences), ils ont créé, dans le cadre d’un programme mis en œuvre par ONU Femmes, une installation artistique ainsi qu’une pièce de théâtre forum pour questionner le phénomène et ouvrir le débat.

Date:

Soutane Guerraoui ONU Femmes Maroc
Soufiane Guerraoui joue dans la pièce Zanka Théâtre créée par le collectif Zanka Bla Violence lors des 16 jours d’activisme contre la violence en 2017. Photo : ONU Femmes / Youness El Moumine

 

« J’ai grandi au Maroc. Et, enfant, bien que réalisant que l’espace public était majoritairement masculin, il ne m’est jamais venu à l’esprit qu’il s’agissait d’un dysfonctionnement, mais simplement d’une culture. Puis viennent le temps, la maturité, la conscience et l’expérience qui m’ont amené à réaliser qu’un espace masculin n’impacte pas les femmes seules, mais également les hommes. Je me posais des questions : pourquoi suis-je seul dans un café ? Pourquoi les rencontres sont-elles si difficiles ? Pourquoi mes amies se préparent-elles psychologiquement à sortir ? Pourquoi dois-je soutenir et défendre les femmes, pour le seul fait qu’elles sortent dans la rue ? Et c’est là que nous avons créé le collectif Zanka bla Violence.

Au sein de notre collectif, nous avons eu comme ambition de créer des œuvres qui touchent le public sans pathos et qui peuvent amorcer le changement dans l’esprit, le corps et le cœur des gens. Nos œuvres ne se contentent pas de l’esthétique, mais questionnent véritablement un phénomène réel, souvent méconnu, car inconsciemment accepté collectivement.

Dans l’installation artistique Zanka Lab, les participants et participantes interagissent avec les quatre composantes de l’œuvre :

D’abord, nous avons voulu montrer aux hommes sur quoi porte le regard d’une femme dans la rue, et inversement, pour révéler la pression du harcèlement qui se matérialise dans une liberté fondamentale, qui est celle du mouvement. Ensuite, on q interpelle les gens sur la profondeur du phénomène car ils interviennent sur l’apparence, l’habillement et les accessoires, comme indices sur la probabilité de harceler ou d’être harcelée. Les chiffres sur la prévalence du harcèlement, présentés dans la 3èmecomposante, démontrent que le harcèlement est bien une réalité. La 4èmeet dernière composante de l’œuvre vient, quant à elle, ouvrir le débat sur les causes du harcèlement et les moyens d’y faire face, à travers une émission radio préenregistrée, confrontant différents points de vue.

L’œuvre a été extrêmement bien accueillie. Elle nous a permis de réaliser que la création d’espaces de dialogues et de partages créatifs était bénéfique aussi bien pour le public que pour les artistes.
Et en tant qu’homme, ce ne serait à priori pas important pour moi de m’impliquer contre le harcèlement, mais parce qu’il est légitimement impensable que les femmes ne puissent pas être libres de leurs mouvements, je me sens tout aussi concerné car sortir se balader seule ne doit plus être un chemin de croix. »

 

Soufiane Guerraoui, 36 ans, est l’un des membres fondateurs du collectif Zanka Bla Violence (Rue sans violences) qui ont choisi le théâtre et la création artistique comme formes d’expression et moyens de sensibilisation du grand public sur le harcèlement sexuel dans les espaces publics, et ce dans le cadre du programme régional « Hommes et femmes pour l’égalité des sexes » mis en œuvre par ONU Femmes au Maroc, Egypte, Liban et Palestine avec l’appui financier de l’Agence suédoise de coopération internationale au développement (SIDA) 

ODD 5 ONU Femmes