Regards croisés Maroc-Tunisie : journées d’étude sur les lois contre les violences à l’égard des femmes

Suite à l’adoption par l’Assemblée des Représentants du Peuple tunisienne d’une loi intégrale contre les violences faites aux femmes en juillet 2017, le Conseil National des Droits de l’Homme marocain et ONU Femmes ont organisé à Rabat deux rencontres d’échanges les 19 et 20 octobre sur les normes et standards, et sur l’expérience tunisienne, en matière de législation relative aux violences faites aux femmes et aux filles.

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Regards croisés Maroc-Tunisie : journées d’étude sur les lois contre les violences à l’égard des femmes
Journée d'étude sur les loi contre la VFF regards croisés: Maroc-Tunisie au Musée Mohamed VI / ONU Femmes

 

Les deux journées étaient organisées à l’occasion de la présence à Rabat de Madame Sana Ben Achour, juriste tunisienne qui a participé à la rédaction de la loi tunisienne et militante des droits des femmes. Les deux moments ont ciblé les différentes parties prenantes impliquées dans le processus législatif au Maroc.

La première rencontre a été organisée jeudi 19 octobre au Musée Mohamed VI à Rabat conjointement par le Conseil National des Droits de l’Homme (CNDH), la coalition du Printemps de la Dignité et ONU Femmes Maghreb. Devant un public composé d’acteurs institutionnels, de la société civile et de juristes et chercheurs, Driss El Yazami, Président du CNDH, et Leila Rhiwi, Représentante d’ONU Femmes Maghreb, ont tour à tour rappelé les normes et standards auxquels le Maroc a adhéré et le travail de suivi, d’accompagnement et de plaidoyer de leurs institutions pour assurer la mise en conformité du droit marocain avec ses engagements internationaux.

Regards croisés Maroc-Tunisie : journées d’étude sur les lois contre les violences à l’égard des femmes
Sana Ben Achour, Abderrazak Hanouchi et Khadija Rouggany / ONU Femmes

 

Driss El Yazami, a déclaré que de nombreuses études officielles, notamment celles du Haut-Commissariat au Plan (HCP), ont reconnu l'ampleur du phénomène de la violence contre les femmes dans la société marocaine. Il a aussi souligné que le cadre législatif Marocain devrait profiter des nombreuses expériences internationales en matière de lois contre la VFF, y compris la Tunisie qui deviens un pionnier en son genre dans la région. Le projet de loi actuel, a-t-il souligné, devrait adopter une vision plus globale et s’étendre sur d’autres secteurs tels que l’éducation, les secteurs de l’audiovisuel, la formation continue des forces de l’ordre et des professionnels de la justice.  

Regards croisés Maroc-Tunisie : journées d’étude sur les lois contre les violences à l’égard des femmes
Leila Rhiwi, Représentante d'ONU Femmes Maghreb / ONU Femmes
 

Leila Rhiwi  a à son tour souligné le travail d’ONU Femmes auprès de ses partenaires gouvernementaux et de la société civile pour mettre fin aux violences faites aux femmes et a rappelé  le cadre normatif, conventions et protocoles internationaux consacrés à la lutte contre la violence faite aux femmes, soulignant la nécessité d’établir un cadre législatif et des politiques publiques en phase avec la Constitution marocaine, qui a d’ailleurs inscrit les principes d’égalité entre les sexes, mais aussi la suprématie des engagements internationaux, et notamment la Convention pour l’élimination de toutes formes de discrimination envers les femmes (CEDEF).

Sana Ben Achour et Khadija Rouggany, avocate marocaine et militante également pour les droits des femmes, ont ensuite donné tour à tour une lecture des textes de la loi tunisienne et du projet de loi marocain. Sana Ben Achour a présenté son analyse du texte de loi tunisien qui comporte 43 articles et adopte une vision globale articulée autour des standards de bonne pratique à savoir la prévention, la protection, la réinsertion et l’accompagnement des femmes victimes de violences et la sanction des auteurs d’actes de violences.  Sana Ben Achour a expliqué qu’ « une loi qui distingue entre les hommes et les femmes est une loi qui banalise et légitimise la violence. C’est pour cela qu’il est nécessaire de revoir non seulement les lois relatives au statut personnel mais aussi l’ensemble des lois qui régissent la vie publique et personnelle et notablement les codes pénaux, les lois relatives à la traite, au travail, à l’éducation etc. ».  Khadija Rouggany, est ensuite revenue sur les similitudes -dont le calendrier d’élaboration et d’examen des projets de loi- et les différences entre les deux textes législatifs.

Regards croisés Maroc-Tunisie : journées d’étude sur les lois contre les violences à l’égard des femmes
Sana Ben Achour, juriste et militante tunisienn, Abderrazak Hanouchi et Khadija Rouggany / ONU Femmes

 

Le jour suivant, Sana Ben Achour a été invitée à intervenir devant les commissions concernées de la Chambre des Conseillers. Les membres élus de la seconde chambre sont les premiers concernés par les débats actuels sur le projet de loi marocain relatif aux violences faites aux femmes. En effet, si le projet de loi 103.13 a été adopté par le Conseil du Gouvernement en mars 2016, puis par la Chambre des Représentants en juillet 2016, il est depuis en attente d’examen par la Chambre des Conseillers. Après avoir présenté le contenu de la loi tunisienne, Sana Ben Achour a échangé avec les Conseillers sur les étapes ayant précédé l’adoption de la loi par les parlementaires en Tunisie, et notamment sur les différents blocages politiques ou sociaux, et sur les leçons tirées de l’expérience tunisienne.

Regards croisés Maroc-Tunisie : journées d’étude sur les lois contre les violences à l’égard des femmes
Deuxième journée d'étude sur les lois contre la VFF au parlement / ONU Femmes