Transformer le premier contact avec la justice
Fournir des services de police et de justice axés sur les survivantes au Maroc
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J'ai toujours eu peur de la police. On entend des histoires de femmes qui se rendent au poste de police pour dénoncer leurs maris violents mais on leur dit « Vous le méritez ». J'ai des amies qui se sont rendues au commissariat avant la création des unités de prise en charge pour les femmes victimes de violence. Selon elles, c'était un cauchemar...
Lorsque la police fournit un service centré sur la survivante et tenant compte des traumatismes, elle peut contribuer à assurer sa sécurité et à minimiser son risque de victimisation. L'expérience positive d'un premier contact d'une survivante avec le système judiciaire peut encourager davantage les femmes et les filles à signaler la violence dont elles sont victimes. Ainsi, en 2018 et dès la publication du texte de loi 103-13 relative aux violennces à l’égard des femmes, la Direction Générale de la Sûreté Nationale, soutenue par ONU Femmes, a restructuré les unités de prise en charge pour les femmes victimes de violence dans les 132 principaux commissariats de police du pays, et un point focal a été nommé dans les 440 commissariats d'arrondissements pour référer les survivantes à l'unité la plus proche.
En tant que point de contact initial pour recevoir, protéger, enregistrer et orienter les cas de violence à l'égard des femmes et des filles, chaque unité est dotée d'un chef de police qualifié et d'un agent de police qui démontrent aux survivantes que le système judiciaire est attaché à leur bien-être et que leur cheminement vers la justice sera soutenu sans discrimination, parti pris ou préjugé.
« Sur le chemin du commissariat, j'avais peur qu'ils m'ignorent et qu'ils ne me croient pas », raconte Laïla*, maltraitée, enceinte et célibataire (les relations sexuelles hors mariage sont pénalisées d'un mois à un an de prison au Maroc) quand elle a demandé de l'aide. « Mais quand je suis arrivée, j'ai été chaleureusement accueillie par une policière. La première chose qu'elle m'ait dite est qu'il y avait une solution à tout. Je n'oublierai jamais cela. C'est devenu d’ailleurs ma devise dans la vie. Ses mots m'ont encouragée à lui raconter toute l'histoire. À l'époque, je ne me sentais pas en sécurité, je me sentais en danger et pensais que ma vie était finie, mais la rencontrer m'a fait réaliser que j'avais encore une chance de reprendre ma vie en main », sourit Laïla. « Après avoir contacté l'unité de police, je me suis sentie responsabilisée et, surtout, soutenue. C'était si bon d'être entourée de personnes attentionnées”. L'unité a ensuite orienté Laïla vers un refuge pour mères célibataires, ce qui lui a permis de poursuivre ses études supérieures tout en s'occupant de son enfant.
Cependant, les services essentiels, les unités de prise en charge pour les femmes victimes de violence et les tribunaux ont tous continué à fonctionner et à fournir des services aux survivantes de violence pendant la pandémie. Un service d'assistance téléphonique fonctionnel 24 heures sur 24 a été mis en place par le Ministère Public pour permettre aux victimes d'atteindre le tribunal et de signaler les cas, et chaque tribunal est également devenu accessible en ligne, permettant aux femmes de déclarer et de déposer une plainte sans avoir à se déplacer physiquement jusqu'au tribunal.
En 2020, la Direction Générale de la Sûreté Nationale a également mené sa première campagne digitale, expliquant ce qu'est la violence à l'égard des femmes et clarifiant les mécanismes juridiques pour protéger les survivantes et informer sur les services et les refuges disponibles pendant le confinement. En 2021, en partenariat avec l'UNODC et l'Association internationale des femmes policières (IAWP), ONU Femmes a élaboré un manuel sur les services de police sensibles au genre pour les femmes et les filles victimes de violence. Le manuel est en cours de diffusion par ONU Femmes, avec le soutien de l'UNODC et de l’IAWP, et est destiné aux cadres intermédiaires et aux premier.es intervenant.es de la police dans toute la région. Il prodigue des conseils pratiques et approfondis sur la manière de réagir lors de crises telles que la pandémie de la COVID-19, sur la prévention des violences faites aux femmes et aux filles dans les situations de conflit et la lutte contre le cyberharcèlement.
* Les noms et informations personnelles ont été modifiés pour protéger l'identité des personnes.
ONU Femmes, en collaboration avec l'UNFPA, le PNUD, l'ONUDC et l'OMS, ont élaboré un programme régional phare pour lutter contre la violence à l'égard des femmes et des filles dans les États Arabes afin de relier la recherche aux recommandations politiques, fournir des orientations pour adapter les normes internationales de prestation de services à la région et renforcer la compréhension et la collaboration inter-institutions dans des domaines tels que la prévention.